JE Penser l’institution à partir d’Axel Honneth. Philosophie sociale et philosophie du droit

Journée d'études

Selon l’acception adoptée, l’institution représente l’élément de stabilité et de permanence dans une société, son inscription dans la durée, ou bien le moment dynamique de la formation des relations sociales (Berger et Luckmann); l’institution est ce qui échappe à la volonté et à ses revirements capricieux, ce qui s’impose objectivement aux acteurs et ce, qu’on la prenne dans son sens juridique ou sociologique[1]. C’est parce qu’elle contraint, et parce qu’elle s’impose, qu’elle peut présenter une dimension illégitime : faut-il moins d’institution pour être plus libre, faut-il assouplir les statuts, soustraire les relations sociales aux cadres et modèles rigides qui les déterminent ? Les libertariens et certains libéraux le défendent, mais le risque est grand d’aboutir par cette voie à des effets liberticides d’un autre ordre. La juriste Muriel Fabre-Magnan rappelle dans un ouvrage récent[2] qu’il faut savoir reconnaître le rôle protecteur et non seulement oppressif du droit objectif. Cette ambivalence de la notion nous engage à vouloir analyser et confronter ses différents sens, afin d’enrichir un débat parfois saturé de simplifications : comment construire un diagnostic critique des institutions, sans abandonner l’analyse de leur dimension constituante pour la vie sociale et politique, et de leur rôle décisif pour l’autonomie individuelle et collective ?

Nous aborderons cette constellation de problèmes à partir de la pensée d’Axel Honneth, l’un des représentants majeurs de la théorie de la reconnaissance, dont la pensée présente l’intérêt de se situer à l’articulation de la philosophie morale, politique, juridique et de l’épistémologie des sciences sociales. Ce dernier se démarque dans La lutte pour la reconnaissance [1992] à la fois d’un modèle de critique des institutions transcendant (à la Rawls), et d’un modèle de critique interne qu’il voit à l’œuvre chez les communautariens. Son projet de philosophie sociale est une théorie tout à la fois de la justice sociale et de l’émancipation qui touche aux institutions familiales, juridiques et politiques, mais encore au marché et à l’entreprise. Portant d’abord sur les dénis de reconnaissance et les fameuses expériences du mépris (La lutte pour la reconnaissance. 2000), sa critique l’a conduit à comprendre les institutions comme « expressions » de modes préexistants de reconnaissance intersubjective. Ce modèle théorique a été ensuite infléchi dans Le droit de la liberté (1995), où les institutions acquièrent une fonction de premier plan dans la reconnaissance à laquelle elles participent désormais.

Ainsi la pensée d’Axel Honneth condense un ensemble de problèmes soulevés par la notion d’institution, interrogeant sa portée épistémologique, descriptive et critique. C’est la raison pour laquelle la journée d’étude souhaite faire discuter des chercheuses et chercheurs en philosophie sociale et politique, en philosophie du droit et sociologie, et à questionner l’institution dans sa pensée, en le confrontant éventuellement à d’autres penseurs comme John Dewey, Nancy Fraser, Michel Foucault, Jacques Rancière.

[1] SEARLE John, 1998 [1995], La construction de la réalité sociale, trad. C. Tiercelin, Paris, Gallimard.

[2] Instituer la liberté, Paris, PUF, 2018.

Participants :  Julia CHRIST (LIER, EHESS, Paris) ; Alice LE GOFF (CERLIS, Université Paris-Descartes) ;  Katia GENEL (CHPMS, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne / Centre Marc Bloch, Berlin) ;  Louis CARRE (FRS-FNRS, Université de Namur) ; Cécile LAVERGNE (STL, Université de Lille)

Programme

Matinée (modération : Marion Farge, STL, Lille)

10h-10h15. Introduction

10h15-11h15.  Julia CHRIST (LIER, EHESS, Paris)
"Comment connaître l'institution ? Hegel, Durkheim et Honneth"

Pause

11h30-12H30. Alice LE GOFF (CERLIS, Université Paris-Descartes)
"Comment penser les institutions économiques? La critique du fonctionnalisme, ses implications, ses enjeux chez Honneth"

Pause déjeuner 

Après-midi (modération : Alexandre Farrugia, STL, Lille)

14h-15h. Katia GENEL (CHPMS, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne / Centre Marc Bloch, Berlin)
"Dysfonctionnements de l'institution chez Axel Honneth" 

15h-16h. Louis CARRE (FRS-FNRS, Université de Namur)
"Luttes dans les institutions. Dewey et Honneth"

Pause 

16h15-17h15. Cécile LAVERGNE (STL, Université de Lille)
"Critique des institutions et utopie chez Axel Honneth"

 17h15. Conclusion

Avec le soutien de l’UMR STL (Savoirs, Textes, Langage, UMR 8163, Lille-CNRS)

Contact : cecile.lavergne[chez]univ-lille[point].fr et gabrielle.radica[chez]univ-lille[point].fr

Participer à la réunion Zoom

https://univ-lille-fr.zoom.us/j/95024891841?pwd=SllMZXA0SHR2TUJSaHpCVzNrQ3hoZz09

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